Affaire Daval : révélations sur les premières minutes de l'enquêteAFP
Pour la première fois, le procureur de la République de Haute-Saône, qui fut en charge de l'affaire Daval, en a dévoilé les coulisses. D'infimes indices sur le corps de Jonathann Daval orientent les enquêteurs dès le premier jour...
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Qu’a dit Jonathann Daval juste après la disparition de sa femme ? Comment les enquêteurs en sont-ils venus à le soupçonner dès les premières minutes ? Le meurtre de la jeune femme par son mari avait fait la une de la presse, à cause des nombreux rebondissements que l’affaire a connus en seulement quelques mois. 

Dans l’acte I, Jonathann Daval joue le veuf éploré, soutenu par ses beaux-parents eux aussi accablés de chagrin. Il participe aux marches blanches, lit des textes en mémoire de son épouse… Et trompe tout son entourage. Même les parents de la victime, qui le considèrent comme leur fils, tombent dans le piège. Il leur faudra de longues minutes pour considérer qu’il est le coupable et encore plus de temps pour digérer la nouvelle. 

Affaire Daval : les deux scénarios de départ

Dans l’acte II, il est passé de veuf éploré à mari suspecté de meurtre. En réalité, les enquêteurs le soupçonnent depuis le début, mais ont besoin de longs mois pour récolter des preuves suffisantes conduisant à son interpellation. Tout s’est joué, en fait, dans les premières heures de l’affaire. Lors d’une interview donnée à RTL jeudi 7 octobre, le procureur de la République de Haute-Saône dévoile les coulisses de cette affaire hors norme, pour la première fois. 

Il se souvient de ce samedi 28 octobre : « Je suis en famille chez moi au moment du déjeuner et je vais recevoir un appel des gendarmes, qui ont reçu le témoignage du mari Jonathann Daval, indiquant que sa femme était partie en début de matinée, réaliser un footing et qu’il ne l’avait pas retrouvée ». Cette disparition peut alors signifier deux choses, explique le magistrat à la radio : « Soit elle a quitté le domicile familial, ce qui peut arriver, ou alors, il s’est passé quelque chose de grave ». C’est à ce moment-là que le procureur demande aux gendarmes de poser de nouvelles questions au mari inquiet.

Affaire Daval : « C’est un meurtrier qui connaît sa victime »

L’intuition du magistrat est la bonne. Cette deuxième audition est « un moment important parce que tout d’abord, on va constater sur son corps des petites traces qui ressemblent à des griffures », explique Emmanuel Dupic à RTL. L’affaire prend un nouveau tournant deux jours plus tard, à la toute fin du mois d’octobre, lorsque le corps d’Alexia Fouillot est découvert partiellement brûlé dans la forêt.

Un moment qui oriente l’enquête car, comme l’explique le magistrat, il « présente des traces probablement de strangulation au niveau du cou et présente également un visage extrêmement tuméfié, c’est-à-dire qu’elle a reçu des coups importants sur le visage ». Pour lui, comme pour les enquêteurs, comme il l’explique à la radio, « ce sont des manifestations plutôt d’un meurtrier qui se situe dans la sphère familiale ». « C’est un meurtrier qui connaît sa victime parce qu’il y a un grand acharnement », ajoute-t-il, l’opposant à un « crime de sang avec un couteau » ou avec une arme, qui est « une mort beaucoup moins douloureuse et beaucoup plus rapide, moins empreinte de tensions entre les protagonistes ». 

Ce n’est que bien plus tard que le suspect craque et avoue tout… 

Affaire Daval : le moment où Jonathann passe aux aveux

En apprenant à Jonathann Daval la mort de son épouse, le magistrat se souvient « de le voir pleurer, s’épancher sur Isabelle Fouillot, elle-même dans une intense émotion », raconte-t-il à RTL. Pourtant, ces larmes ne trompent pas les gendarmes, qui referment petit à petit leur piège sur lui. Au mois de janvier, trois mois après la découverte du corps d’Alexia Fouillot, Jonathann Daval passe aux aveux, lors d’une « garde à vue difficile », selon le procureur de la République de Haute-Saône.

Pendant 48 heures, le suspect « est entendu à cinq reprises » et ne craque qu’ « à la fin, à la cinquième audition ». Pour Eric Dupic, cela « fait partie des catégories des aveux qu’on obtient parce qu’on est acculé. On est dos au mur ». Il lui faudra encore de longs mois pour reconnaître avoir tenté de brûler le corps de la jeune femme. Jugé en novembre 2020, il a été condamné à 25 ans de réclusion criminelle.

Crédit photo : ©AFP