Affaire Gaston Dominici : qui est l’assassin ?AFP
En 1952, une famille anglaise est sauvagement assassinée dans un village du sud de la France. Un vieux monsieur fait alors figure de principal suspect, mais sa culpabilité n'est jamais prouvée. Retour sur l'une des plus grandes énigmes judiciaires de notre pays.
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70 ans de mystère. Le 4 août 2022 marquera un nouvel anniversaire de ce qui est connu aujourd’hui comme l’affaire Gaston Dominici, du nom de l’homme qui a passé des années en prison pour ce qui est toujours aujourd'hui une énigme judiciaire. Ce soir d’été 1952, la paisible commune de Lurs, dans les Basses-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence) est le théâtre d’un crime sanglant. Les trois membres de la famille Drummond, le mari, sa femme et leur fille de 10 ans, sont tués. 

Affaire Dominici : un meurtre d'une rare violence

Plusieurs coups de feu sont entendus peu après 1 heure du matin et le corps de la fillette est découvert quelques heures plus tard, portant des coups de crosse de carabine. Les cadavres de ses parents ne sont pas loin, abattus par balles. Pourquoi cette famille s’est-elle arrêtée au bord de la route alors qu’elle devait rejoindre des amis dans leur villa le soir même ? C’est un mystère. Rien n’a été volé parmi leurs effets personnels, sauf l’appareil photo de Jack Drummond.

À une centaine de mètres des lieux du drame se trouve la ferme du clan Dominici, baptisée La Grand’Terre, mais qui est en réalité assez modeste. Le couple et ses neuf enfants sont très soudés autour du patriarche, Gaston, qui commande depuis toujours et pour toujours. C’est le commissaire Edmond Sébeille qui est chargé de mener l’enquête et il s’oriente vite vers le clan Dominici. Durant de longs mois, il écoute les différentes versions mais se heurte surtout à des mensonges, de la part du clan Dominici. Gustave, le seul fils qui vit encore à la ferme, fait figure de principal suspect. Il dit une chose, puis l’autre, changeant de version en quelques heures. Il accuse son père de meurtre, puis se rétracte, avant de l’accuser à nouveau. L’un des autres fils de Gaston, Clovis, accuse lui aussi le patriarche de meurtre.   

Affaire Dominici : la condamnation du patriarche

Le patriarche finit lui aussi par s’accuser des trois assassinats, devant les enquêteurs puis devant le juge et même lors d’une reconstitution. Il dit alors se sacrifier pour sa famille, puis se rétracte à son tour. Pour les forces de l’ordre, c’est trop tard et l’homme fait office de suspect. Pourtant, d’autres pistes sont évoquées, comme le fait que Jack Drummond soit un agent secret et qu’il aurait eu rendez-vous avec un informateur et aurait pu être tué par d’autres agents. 

Jugé à Dignes à la fin de l’année 1954, Gaston Dominici clame une nouvelle fois son innocence, mais semble connaître la vérité, sans pour autant vouloir la dire. Il est condamné à mort à l’issue du procès, mais sa peine se transforme ensuite en réclusion à perpétuité. Il est finalement gracié en 1960, du fait de son grand âge. Il meurt en 1965, à l’âge de 88 ans, emportant avec lui tous les secrets de sa famille. 70 ans plus tard, un ancien commissaire pense pourtant avoir percé le mystère.  

Affaire Dominici : un meurtre commis par trois hommes ?

Dans les années 2010, un ancien commissaire a longuement repris l’enquête et publié un livre sur l’Affaire Dominici. Selon lui, trois personnes ont été impliquées dans le meurtre ce soir-là, dont le patriarche Gaston, son fils Gustave et le petit-fils Roger Perrin. Comme l’explique Ouest-France, une altercation aurait éclaté entre le patriarche et l’Anglais et le ton serait vite monté, peut-être à cause d’une incompréhension liée à la langue ou à une trop forte consommation d’alcool. La femme aurait été tuée, puis le mari.

La mort de la petite Elisabeth, dont le corps été retrouvé plus loin, reste un mystère. L’ancien commissaire dresse sa théorie : « Ils ne pouvaient laisser vivante une fillette de 10 ans qui risquait de les dénoncer. Selon moi, ils ont transporté l’enfant jusqu’au talus, à l’abri des regards, avant de la tuer. Or, dans ce cas, il s’agit d’un meurtre prémédité et réfléchi. Et pour un tel acte, ils auraient été condamnés à la peine de mort, sans grâce possible ». 

La triple implication expliquerait les mensonges des uns et des autres, car impossible pour les différents protagonistes d’en dire trop sans s’incriminer. Si cette piste livre des explications, elle ne permet pas de connaître la vérité. Alors que la grande majorité des protagonistes sont morts, seule une lettre posthume permettrait de savoir ce qu’il s’est réellement passé il y a bientôt 70 ans, le 4 août 1952. À moins qu'un descendant n'ait besoin de soulager sa conscience.