Henri Bilot, le « vampire » nécrophile de Saint-Ouen qui a fait trembler la France au XIXème siècle
En 1886, Henri Bilot, un ancien fossoyeur de 26 ans, est arrêté à Saint-Ouen, en banlieue parisienne On le soupçonne d'avoir commis des crimes particulièrement atroces. Il aurait déterré plusieurs cadavres dans le cimetière de la commune : celui d'une jeune femme et celui d'un bébé, avant de pratiquer sur les dépouilles des actes de nécrophilie. La presse, horrifiée, le surnomme « le vampire de Saint-Ouen ». Récit de son parcours glaçant.
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En apparence, Henri Bilot, l’ancien fossoyeur du cimetière de Saint-Ouen, a tout d’un jeune homme de bonne composition. C’est un beau garçon, au teint pale et aux yeux ébène. Mais sous la surface, il tiendrait plus du monstre.

Le 26 mars 1886, le cadavre d’une jeune fille de dix-huit ans, Fernande Méry, est découvert, couché au bord de la fosse commune de Saint-Ouen. Il a été profané.

Quelques mois plus tard, dans l’autre cimetière de la ville, le cauchemar se poursuit. Cette fois, c’est la dépouille d’un bébé de onze mois, la petite Pauline C, décédée de la variole, qui a tout simplement disparu. Le cercueil est éventré, la couronne de fleurs, déposée en travers de sa tombe, a été piétinée, et gît dans la boue.

La nouvelle se répand dans la commune, et l’effroi s’empare des habitants, et les questions fusent. Qui est le mystérieux profanateur ? Pour quelles raisons a-t-il commis ces actes odieux ? Et où est le corps de la petite Pauline ?

Des abus « que la plume se refuse à nommer »

Peu de temps après, les fossoyeurs du cimetière, qui ratissent les allées à la recherche d’un suspect, tombent sur un homme à l’air hagard, et aux vêtements défaits. En les apercevant, l’individu se met à escalader précipitamment le muret du cimetière. L’un des employés le reconnait immédiatement : c’est un ancien collègue. Il s’appelle Henri Blot, et il est âgé de 26 ans.

Les gardiens parviennent à le rattraper et à le maitriser.

Pendant ce temps, le conservateur du cimetière a décidé d’aller jeter un œil du côté d’une petite cabane, qui dépend du cimetière. A l’intérieur, il découvre, avec stupeur, le cadavre de la petite Pauline, posé à même le sol, la tête sur une pile de journaux.

Son linceul est couvert de boue.

La police ne tarde pas à investir les lieux, tandis que les badauds se pressent autour du cimetière en scandant « A mort, le misérable ! », rapporte à l’époque le Petit Journal.

Un médecin légiste procède à l’examen de la dépouille. La victime a été victime d’abus « que la plume se refuse à nommer », note encore le journal.

La « passion bestiale » d’Henri Blot, le « vampire de Saint-Ouen »

Appréhendé par la police, Henri Blot reste prostré dans un coin du cimetière, lâchant par moments quelques sourires et murmurant qu’il est innocent. Il demande même à ses anciens collègues une cigarette et un verre de vin.

Il est finalement transféré au commissariat. « Ses yeux brillent d’un éclat extraordinaire », commente le Petit Journal.

Le jeune homme, âgé de 26 ans, n’a pourtant rien d’un criminel de sang-froid. Il est marié et père d’un petit garçon de 4 ans. Mais en creusant un peu, les enquêteurs découvrent qu’Henri Biot ne vit plus avec sa femme, « pour des raisons d’un ordre tout intime et qui dénotent de la passion bestiale de Bilot ». Traduction : l’homme battait son épouse, et aurait des pratiques sexuelles déviantes.

Depuis la séparation, Henri Bilot, serait, de son propre aveu, « comme un fou », s’adonnant à la boisson soir après soir. « Je ne cache pas que j’ai eu l’idée de tuer ma femme et de me tuer après », confiera le suspect lors de son procès.

L’enquête établira qu’il est bien responsable des horribles profanations. Il a bien déterré les deux cadavres, avant de les violer et de s’endormir, ivre, aux côtés des corps. Lui-même finira par avouer.

« Que voulez-vous, chacun a ses passions. Moi la mienne, c'est le cadavre ! », scandera Bilot devant les enquêteurs médusés.

Henri Bilot, le « vampire de Saint-Ouen » : combien de cadavres a-t-il vraiment souillés ?

Au médecin qui l’examine, il raconte encore :

« La seconde fois j'avais bu de l'absinthe, du bitter et un peu de vin. J'ai le souvenir que j'étais tout à fait ivre. Je ne sais pas comment je suis venu vers le cimetière. Je me rappelle bien que j'ai escaladé le mur. À partir de ce moment je ne peux plus rien préciser, je ne me souviens absolument de rien. Comment j'ai pris l'enfant, comment je l'ai emporté dans la baraque, je n'en sais rien. Je me suis endormi et, le matin en m'éveillant j'ai été bien étonné de me trouver là. »

Il précise avoir placé du papier journal sur le sol pour « ne pas salir son pantalon ».

L’homme est jugé en aout 1886, quelques mois après son arrestation, devant le tribunal correctionnel de Saint-Ouen.  A la barre, le prévenu « n’éprouve aucune émotion. Il s’exprime fort correctement et sans embarras », note à l’époque le chroniqueur judiciaire du Figaro.

Dans la salle d’audiences, une terrible question plane : l’ancien fossoyeur s’adonnait -il aux mêmes crimes lorsqu’il travaillait dans le cimetière ? Un employé raconte qu’à l’époque où Bilot s’occupait de la tenue des lieux, on retrouvait souvent, au petit matin, des cercueils décloués. Mais on attribuait alors le phénomène à l’humidité. « Pendant les quinze mois où il a été fossoyeur, on a constaté très fréquemment souvent des dislocations de cercueils », commente le Figaro.

Combien de dépouilles le terrible « vampire » a-t-il vraiment profanées ?

Pour autant, le psychiatre qui a examiné Henri Bilot est formel : il ne présente aucune forme d’aliénation mentale, et reste donc pleinement responsable de ses actes.

Au terme des débats, il est condamné à deux ans de prison pour « outrage public à la pudeur ».

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