AFP
Sexe, trahison et meurtre sordide, l'affaire de la malle à Gouffé a fait la Une des journaux dans les années 1890. À l'origine, l'appât du gain d'une jeune femme et de son amant diabolique...
Sommaire

Elle a passionné l’opinion publique à la fin du XIXe siècle. Si les faits divers n’ont plus à prouver leur popularité depuis plusieurs décennies, il en était de même il y a 130 ans. L’affaire de la malle à Gouffé ne fait pas exception et a connu de multiples rebondissements dans les années 1890, faisant très régulièrement la Une des journaux. Il faut dire que cette affaire a tout d’un roman, dans lequel se mêlent à la fois trahison, meurtre sordide, sexe et appât du gain.

La malle à Gouffé : découverte sanglante près de Lyon

Tout commence le 13 août 1889 avec la découverte d’une malle par un certain Denis Coffy, près de Lyon. L’homme a été alerté par des passants qui affirment avoir senti une odeur nauséabonde s’échapper d’un sac en toile. Arrivé sur place, il ne peut que constater les faits et découvre, à l’intérieur de ce bagage, un cadavre nu et en état de décomposition avancé. L’autopsie révèle que cet homme est visiblement mort depuis trois à cinq semaines et qu’il a été étranglé, mais impossible pour autant de l’identifier. Deux jours après cette sordide découverte, un homme retrouve les fragments de la malle, dont la même odeur affreuse se dégage. Une étiquette des chemins de fer indique qu’elle a fait le voyage de Paris à Lyon.

Il faudra attendre le mois de novembre 1889, après une nouvelle autopsie qui dure huit jours, pour que ce cadavre ait enfin un nom : il s’agit de Toussaint-Augustin Gouffé, huissier parisien d’une quarantaine d’années et dont la disparition commençait à faire du bruit dans la capitale. Peu de temps avant de s’évaporer, cet homme de bonne réputation a néanmoins fréquenté un couple d’escrocs, des noms de Michel Eyraud et de Gabrielle Bompard. Coïncidence ? Les deux amants ont quitté précipitamment Paris au moment de la disparition du bon huissier et demeurent introuvables. Les policiers lancent alors un mandat d’arrêt international à leur encontre, car ils sont en fuite en Amérique. Pas besoin de traverser l’Atlantique puisque peu de temps après, au mois de janvier 1890, la jeune Gabrielle Bompard se constitue elle-même prisonnière, pensant ainsi duper les enquêteurs…   

La malle à Gouffé : jeu sexuel et strangulation

En Amérique, Gabrielle Bompard et Michel Eyraud entendent bien plumer un autre pigeon fortuné. Seulement, la jeune femme a une autre idée en tête et profite de la crédulité de sa victime pour repartir en France avec lui. Là, elle se rend elle-même à la police pour jeter la faute sur le dos de son amant diabolique, mais son plan échoue. Elle ne tient pas longtemps face aux preuves récoltées par les enquêteurs et finit par tout leur raconter, y compris son implication dans le meurtre sordide. Michel Eyraud – qui entre temps a continué sa vie en Amérique – est finalement arrêté à Cuba en juin 1890, près d’un an après la découverte de la malle. 

Le déroulé de ce jour funeste de 1889 est alors bien connu. Gabrielle Bompard a servi d’appât à l’huissier, l’invitant chez elle après une fausse rencontre, orchestrée dans un café. Elle loue en réalité un appartement avec son amant, dans le 8e arrondissement de Paris, où elle tente de séduire sa victime. Elle lui propose un jeu sexuel, lui passant autour du cou la ceinture qui ferme sa robe de chambre, sous laquelle elle s’est présentée nue. Caché derrière un paravent, Michel Eyraud attrape l’autre bout de la ceinture l’attache à une corde – elle-même reliée à une poulie – et tire pour étrangler Gouffé. Ce dernier résiste et est finalement étranglé à main nue par son meurtrier. Selon la légende, les amants font l’amour juste après, à seulement quelques centimètres du cadavre. C’est alors que débute l’histoire de la malle…  

La malle à Gouffé : la « Bompard » vite oubliée

Comment le corps de l’huissier Gouffé a-t-il traversé la moitié de la France ? Les amants diabolique placent le cadavre dans une malle qu’ils ont achetée peu de temps auparavant à Londres et l’expédient jusqu’à Lyon, où ils la récupèrent, puis la transportent quelques kilomètres avant de l’abandonner au hasard, où elle est finalement découverte au mois d'août.

Les amants sont jugés en décembre 1890 devant la cour d’assises de la Seine et le procès est expéditif. Au bout de quatre jours, Michel Eyraud est condamné à mort. Il est guillotiné le 3 février 1891. Gabrielle Bompard bénéficie de la clémence du juge puisqu’elle est condamnée à 20 ans de travaux forcée et est finalement libérée en 1905 pour bonne conduite. Devenue ouvreuse dans un cinéma, elle meurt en 1920, son nom oublié de tous... Mais à jamais associé à l'une des plus grandes affaires du XIXe siècle.