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Au milieu des années 1980 et pendant trois ans, Thierry Paulin, âgé d'une vingtaine d'années, se lance dans une série de meurtres et d'agressions qui a plongé la France, et plus particulièrement Paris, dans la psychose. Le tueur s'attaque, à chaque fois, à de vieilles dames sans défense. Mais pourquoi un tel acharnement ?
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C’est une affaire criminelle terrible, qui marqué les esprits et continue certainement de hanter les familles des victimes. En quelques mois, un jeune homme vivant au-delà de toute morale va violemment s’en prendre à 20 femmes âgées, vivant seules, à Paris. Elles ne seront que deux à survivre.

Une première vague de meurtres

Le 5 octobre 1984, Anna, une veuve de 83 ans, est retrouvée sans vie dans son appartement du 9ème arrondissement de Paris. L’octogénaire est bâillonnée, son visage est tuméfié. Elle a été étranglée.

La vieille dame vivait seule dans un modeste trois-pièces au pied de Montmartre. L’appartement est sans dessus-dessous, mais, détail curieux, il n’y a aucune trace d’effraction.

Les enquêteurs retrouvent dans la chambre une trace palmaire, complète. Mais les analyses ne donnent rien.

Le même jour, une autre vieille dame, Germaine, âgée de 91 ans, contacte la police qui se rend chez elle. Elle raconte avoir été agressée par deux individus, qui l’ont suivi dans la rue avant de se ruer chez elle, où ils l’ont bâillonnée avant de lui voler environ 18 000 francs. La vieille dame a survécu mais sous le choc, Germaine est incapable de décrire ses agresseurs.

Du 5 octobre au 12 novembre, l’affaire va prendre une tournure dramatique. 8 autres vieillesdames sont agressées et assassinées chez elle, dans le 18ème arrondissement de la capitale, en seulement quelques jours. La violence des crimes est insoutenable. Les victimes ont été battues à mort, certaines ont la tête dans un sac plastique, et on retrouve même des traces de détergent dans leur estomac. A chaque fois, le mobile de leur agression semble être crapuleux. Chez quatre victimes, les enquêteurs retrouvent la même trace palmaire que chez Anna. Mais cette empreinte n’est pas répertoriée, et ne leur permet pas d’identifier un suspect. L’enquête piétine, et l’affaire crée la psychose dans tout Paris. Qui peut bien s’en prendre aussi cruellement à de vieilles dames ?

Deuxième vague : la psychose

Entre décembre 1985 et juin 1986, une deuxième vague de crimes similaires est à déplorer. Là aussi, ce sont 8 vieilles dames qui sont tuées brutalement chez elles. Pour la police, il ne fait aucun doute : il s’agit du même meurtrier.

En novembre 1987, les agressions reprennent. Deux vieilles dames décèdent, une troisième survit de justesse. Toutes ont le même profil ; elles vivent seules, isolées, aux alentours du 18ème arrondissement de Paris. A chaque fois, leur agresseur les suit et s’introduit de force chez elles avant de les agresser, de les étrangler ou de les étouffer et de dépouiller leur appartement de divers biens (bijoux, argent…).

Berthe, agressée le 25 novembre et laissée pour morte, va parvenir à décrire son agresseur aux forces de polices, qui vont alors réaliser un portrait-robot. Le « tueur de vieilles dames » serait un homme métis d’une vingtaine d’années, au nez épaté et aux cheveux colorés en blond.

C’est grâce à ce portrait que le meurtrier va enfin être confondu.

Le « roi de la nuit » était un tueur de sang froid

Le 1er décembre 1987, le commissaire Francis Jacob croise un jeune homme dans Paris. Il ressemble trait pour trait au portrait-robot du suspect. Il décide de l’interpeller. En garde à vue, cet homme, âgé de 24 ans, va alors passer à table et avouer une vingtaine de meurtres.

Il s’appelle Thierry Paulin, et est né en 1963 en Martinique. Elevé par sa grand-mère, il évoque une enfance difficile, entouré par la drogue et la misère. A l’adolescence, Thierry Paulin devient incontrôlable. Il est condamné à deux reprises à des peines de prison pour des agressions. Hors des murs, son train de vie est flamboyant.

Homosexuel, Thierry Paulin court les soirées les plus folles de la capitale et dépense sans compter. Alcool, boîtes de nuit, drogues et aventures... A l'époque, il aurait même fréquenté… lechanteur Jean-Luc Lahaye. L’artiste le raconte dans l’un de ces livres qu’il aurait rencontré le tueur dans une soirée mondaine : « je ne le connais pas, ne sais même pas comment il s’appelle, ni ce qu’il fait là, mais il a un physique étonnant. Au bout d’un temps je comprends que c’est le petit ami de mon avocat. Il est toujours aux petits soins avec moi, veut toujours me faire plaisir. Son nom, je vais le découvrir plus tard, avec effroi. Thierry Paulin, le tueur en série! ».

Thierry Paulin, que les experts qualifieront de « narcissique » finit par contracter le SIDA en 1985.

Ses empreintes correspondent bien à toutes les scènes de crime. Acculé, il dénonce également son complice, qui n’est autre que son ancien amant, Jean-Thierry Mathurin, qui aurait participé à 8 meurtres à ses côtés.

Au terme de sa garde à vue, Thierry Paulin est mis en examen pour 18 meurtres.

Il aurait pu être arrêté…

Dans cette affaire, les enquêteurs vont découvrir que les empreintes du tueur avaient été archivées dès l’année 1982, soit quatre ans avant les premiers meurtres, par la police de Toulouse. Mais à l’époque, il n’existait aucun moyen de communiquer ces données d’un commissariat à l’autre. Les autorités se rendent à l’évidence : un tel système leur aurait permis d’arrêter Paulin dès ces premiers crimes, en 1984, et de nombreuses victimes auraient été épargnées. C’est ainsi que l’affaire a contribué à la création en 1987 du FAED, le fichier automatisé des empreintes digitales.

Pas de procès pour le tueur de vieilles dames

Désormais, les familles des nombreuses victimes n’attendent qu’une chose : que Thierry Paulin soit jugé pour ses crimes. Mais l’homme, atteint du SIDA, succombera des suites de sa maladie le 16 avril 1989, avant la tenue de son procès.

Son complice, Jean-Thierry Mathurin, comparait  donc seul en décembre 1991 devant la cour d’assises de Paris. Il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une peine de sûreté de 18 ans. Il a été libéré en 2009.